Les caves coopératives audoises

Dans les années 50-60, les photographes Hilla et Bernd Becher décident d'inventorier les installation relatives à l'industrie lourde, mines, hauts-fourneaux, châteaux d'eau,...
Dans l'Aude, nous n'avons pas d'industrie lourde. Nous avons bien une mine, mais nous préférons ne pas trop en parler ; elle ne nous a pas laissé de très bons souvenirs...
Par contre, nous avons des caves coopératives, créées par les vignerons pour défendre la viticulture en se groupant. Un pour tous, tous pour un était leur devise.
Mais comme les aciéries de la Ruhr, les caves coopératives disparaissent.
J'ai donc décidé de partir à la rencontre de ces constructions, avec leur variété architecturale.
Certaines sont à l'abandon, car la déconstruction de ces structures en béton armé coûte souvent plus cher que le terrain sur lequel elles sont bâties, a quelques exceptions près, notamment la zone littorale.
Enfin quelques rares autres ont trouvé un autre usage, espace d'art contemporain, habitat, école, atelier ou même support de panneaux photo-voltaïques.
Nos caves coopératives, un peu à l'image de l'architecture de notre département sont modestes. On ne trouve pas les prouesses de certaines caves, notamment dans l'Hérault.
La raison en est simple ; l'Aude est un département pauvre.
Lorsque dans les années de 1910 à 1940, les viticulteurs ont choisi de se regrouper en coopératives, c'est l'efficacité qui a été leur première motivation.
Si l'on ajoute qu'un seul architecte a construit plus d'un tiers des caves (49 sur 142), Jules Pierre Reverdy (1873-1936), on ne s'étonnera pas d'une certaine uniformité dans la construction de ces bâtiments.
Mais ces caves nous parlent des luttes des viticulteurs audois durant tout le XXe siècle, de la révolte des gueux de 1907 aux Comités d'Action Viticole puis à la fusillade de Montredon, le 4 mars 1976.
La place devant la cave coopérative de Saint André de Roquelongue s'appelle Place Emile Pouytès, du nom de ce viticulteur d'Arquette en Val tué lors de cette fusillade.
J'ai une pensée particulière pour Jean Vialade (1926-2013) , avec qui j'ai fait un bout de chemin, lorsque sur la cave coopérative de Ribaute on retrouve le logo de Nature et Progrès, montrant qu'il avait réussi à convaincre les viticulteurs de cette commune de passer en agriculture biologique.
Ribaute sera la première cave coopérative d’Europe à vinifier en bio !
Sur cette même cave on trouve aussi un dessin de sanglier et l'inscription Les vignerons du Val d'Orbieu : membre fondateur.
Mais cette SCA deviendra Vinadeis, un des plus gros groupe de production vinicole, bien loin de l'idéal coopérateur des pionniers.
Ainsi, même si nos caves coopératives ne sont pas des chef d'œuvre d'architecture, elles nous parlent de cet idéal coopératif, de ces luttes pour garder les campagnes vivantes, et préserver la viticulture occitane.

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Auteur : Michel Cornuet - Licence Creative Commons BY-SA